Le salon vert

Léda et le cygne

^{Terre cuite
Vers 1775-1800, Claude Michel dit « Claudion » (1738-1814) 
Hauteur : 39.5cm ; Largeur : 20cm ; Profondeur : 20cm
Signé sur l’étai au dos : « CLAUDION »
D.R.202}

Claude Michel dit Claudion est né à Nancy où il passe toute sa jeunesse. En 1755, il part en apprentissage à Paris chez son oncle Lambert Sigisbert Adam (1700-1759),  né comme lui dans la capitale du duché de Lorraine. Après le décès de son parent, il intègre l’atelier de Jean-Baptiste Pigalle (1714-1785) puis effectue un séjour en Italie (1762-1771), après avoir obtenu le Grand Prix de sculpture de l’Académie royale et la première médaille d’argent pour ses études d’après modèle.  Il découvre le  nouveau style Transition, période charnière entre les mouvements rocaille et néo-classique. C’est à cette esthétique qu’il faut rattacher l’abondante production de statuettes en terre cuite qui conjuguent la lascivité des modelés baroques et le goût inspiré de la mythologie antique.  A partir de 1770, le style néoclassique prend le pas et Clodion diversifie sa production en fournissant des reliefs à l’Antique, des sculptures monumentales et des modèles en bas-relief adaptés pour des torchères et candélabres par des bronziers.

Dans la mythologie grecque, Léda est l’épouse  de Tyndare,  roi déchu de Sparte. Afin de la séduire, Zeus prit la forme d’un cygne. De cette union, naquirent deux paires de jumeaux, Hélène et Pollux et Castor et Clytemnestre, ces derniers considérés comme la propre descendance de Tyndare.  Par ses contours aux multiples angles de vue et Léda représentée nue,  la statuette de Montaigu s’inscrit dans le gout de son époque. Il traduit l’engouement pour la catégorie des petits groupes sculptés réalisés pour des amateurs-collectionneurs qui ne se démentira plus jusqu’à la fin du siècle. 

Chiffonnier

^{Acajou massif et placage en acajou moucheté, bronze ciselé, marbre blanc
Époque Louis XVI, Jean-Henri  Riesener (1734-1806)
Hauteur : 1.33m ; largeur : 0.78m ; Profondeur : 0.41m
Estampillé avec la marque de Jurande
D.R.348 bis}

Jean-Henri Riesener fut le plus grand ébéniste de son époque.  Arrivé de la ville d’Essen en Allemagne pour préparer sa maîtrise, il trouve une place au faubourg Saint-Antoine à Paris, chez le maître Jean-François Oeben. Lorsque ce dernier décède en 1763, il gagne la succession de l’atelier avec la promesse de terminer le célèbre bureau à cylindre du roi louis XV, une des pièces majeures du mobilier du château de Versailles.  Remarqué pour son talent, il intègre le Mobilier de la Couronne puis devient l’ébéniste attitré de la reine Marie-Antoinette. Critiqué pour ses prix prohibitifs, il sera remplacé, après dix ans de commandes soutenues, par Guillaume Benneman.

Le corps du meuble présente des lignes droites, pures et équilibrées. La fantaisie est matérialisée par les pieds fuselés prolongés par des montants arrondis et cannelés, et le décor de bronze qui rompent avec la sobriété des surfaces. Ce dernier rythme de façon rigoureuse l’élévation du meuble : rudentures sur les montants cannelés dans la partie inférieure, liserés de rangs de perles matérialisant les tiroirs, entrées de serrure, poignées, ceinture et galerie empruntent aux formes du répertoire antique. 
Le chiffonnier de Montaigu s’inscrit dans les productions du milieu de sa carrière. A partir de 1780, le style de Riesener évolue vers une plus grande mise en valeur de l’architecture du meuble et une plus grande austérité des compositions, toujours aussi élégant mais sévère, qualifiant son art de « masculin ». Sans conteste, le chiffonnier Riesener est la pièce maîtresse de la collection mobilière du château de Montaigu. 

Bureau à dos d’âne

^{Laque de Chine noir et or (panneaux en « décor de chinoiseries »), vernis Martin (corps du meuble), bronze ciselé
Époque Louis XV, Jacques Dubois (1693-1763)
Hauteur : 103.5cm ; Largeur : 108cm ; Profondeur : 55cm
Estampillé sous la traverse antérieure et poinçonné du C couronné sur le bronze
D.R.336}

Trois catégories de meubles destinés à l’écriture ou la correspondance se distinguent à partir de leur aspect formel. Le bureau plat, souvent associé à son cartonnier,  fait son apparition sous le règne de Louis XIV. L’écriture se fait alors sur un plateau en bois mobile (ou écritoire) indépendant du meuble. Sous le règne de Louis XV, le bureau à pente domine la production des secrétaires. L’écritoire se transforme en volet relié au meuble et, qui une fois rabattu, lui donne son nom. A la fin du XVIIIe siècle, ce dernier est abandonné au profit du bureau à cylindre. Un demi tambour (ou rabattant) glisse à l’intérieur du meuble, une tablette est tirée vers l’avant pour écrire.

Longtemps ouvrier libre du faubourg Saint-Antoine à Paris, Jacques Dubois obtient sa maîtrise à un âge tardif, ce qui ne l’empêche pas de mener une brillante carrière. Ebéniste du roi, il fournit la grande noblesse française et étrangère. Ses meubles haut de gamme se caractérisent par l’emploi de placages de bois précieux, d’ornementations et d’encadrements en bronze finement ciselés et surtout de vernis Martin et de panneaux en laque oriental pour les décors « à la manière de Chine ». Le meuble de Montaigu s’inscrit dans cette production et fait partie d’une série à plusieurs versions de laques rouge et noir.

Le poinçon du « C » couronné indique une taxe appliquée sur les bronzes entre 1743 et 1747. Ce qui permet de dater précisément le meuble, à condition que les bronzes aient été réalisés pour ce dernier et non pas rapportés. 

Paire de statuettes

^{Porcelaine émaillée polychromée, bronze doré et ciselé
XVIIIe siècle, Manufacture  Royale de Meissen (Allemagne)
Hauteur : 28cm ; Longueur : 17.5cm ; Largeur : 15cm
Hauteur : 25.5cm ; longueur : 15.5cm ; Largeur : 17.5cm
D.R.229}

La porcelaine, fabriquée à partir d’argiles de kaolin, est une invention chinoise du VIIe-VIIIe siècle.  Importée en Europe depuis le XIIIe siècle grâce aux explorateurs du Moyen Âge, elle n’a cessé de fasciner en raison de ses caractéristiques avantageuses : imperméabilité, résistance thermique, non rayable à l’acier, translucidité, légèreté. Conscients de la valeur et du potentiel marchand du matériau, les états occidentaux financent des programmes de recherches afin de découvrir les recettes de sa fabrication. En 1710, alors qu’en France, on cherche encore des gisements de Kaolin, le chimiste allemand Johann Friedrich Böttner découvre le secret de la porcelaine dure.  Afin de protéger l’invention, le Duc de Saxe Auguste Lefort  fonde à Meissen la première manufacture de porcelaine européenne. Outre la matière première, elle se distingue par la production d’une « fabuleuse ménagerie de porcelaine » déclinée en de multiples personnages et figurines, mises en scène dans de savantes compositions. La mise au point d’une palette de couleurs aux nuances inégalées parachèvent l’extraordinaire rayonnement mondial de la célèbre fabrique. C’est le triomphe du décor peint. C’est à cet élan créateur qu’il faut rattacher les deux groupes de singes montés sur des socles de bronze ciselé : assis sur des fleurs polychromes en relief, l’un est enchaîné à un rocher et cueille des graines qu’il dépose dans un tablier, un autre et son petit se nourrissent de fruits murs stockés au creux d’un linge. 

Les comédiens italiens près de la fontaine

^{Huile sur toile
1ère moitié du XVIIIe siècle, attribué à Nicolas Lancret (1690-1743)
Hauteur : 112.5cm ; Largeur : 118cm ; Profondeur : 8cm
D.R.195}

Au milieu du XVIe siècle, un nouveau genre de théâtre apparaît en Italie: la Commedia dell’arte. Basé sur l’improvisation à partir de scénarios justes esquissés, ce type de spectacle, où le jeu corporel et le geste priment sur le texte et le décor, met en scène des personnages dont certains noms sont restés célèbres (Arlequin, Polichinelle, Colombine, Scapin, Pantalon, Matamore, Pierrot, etc.). Ils sont souvent déguisés, masqués, ont des rôles de comiques, railleurs, bouffons pris dans des farces et intrigues amoureuses qui se terminent parfois en bastonnades.  La Commedia dell’arte aura une influence considérable sur des littérateurs du XVIIe siècle, comme Molière et sa troupe dans les « Fourberies de Scapin ». 
Au XVIIIe siècle, Nicolas Lancret les figure en pleine représentation. Dans un décor champêtre à la savante composition, ils se donnent la réplique. Au premier plan, un homme musicien tente de séduire deux femmes avec sa mandoline mais l’une d’entre elle est distraite par la scène qui se déroule en arrière-plan. Là, nous reconnaissons : Arlequin masqué et vêtu d’un costume à losanges colorés, empressé auprès d’une femme qui le repousse ;  Pierrot, debout dans son costume blanc caractéristique et le valet tout à gauche ont le regard plongé dans le décolleté provoquant d’une femme. 
Dans ce tableau, Nicolas Lancret adopte un style proche de celui de Watteau (tous deux partagèrent le même atelier) connu pour ses représentations de comédiens italiens qui laisseront la place aux scènes galantes et mythologiques de Jean-François Boucher et Jean-Honoré Fragonard.